AlloCiné Séries : Pensez-vous que votre personnage ait évolué entre les saisons 4 et 5 ?
Kim Raver : Audrey a complètement changé. J'ai adoré tout ce qui s'est passé pendant la saison 4 et j'ai adoré jouer tout ça mais j'avais dit aux scénaristes que je voulais qu'elle change. Faisons un parallèle avec New York 911, lorsque quelque chose de grave arrivait à un personnage, il n'était plus le même après. Ça devait être pareil pour Audrey. Soit elle était complètement cassée, soit elle revenait plus forte. C'est aussi pour cela que cette saison est extrêmement intéressante parce qu'Audrey fait face à des choix et doit prendre des décisions, influencées bien entendu par ce qu'elle a vécu.
Dans "24", Audrey et Jack entretiennent une relation alors même que le danger les entoure constamment. Dans la vraie vie, vous pourriez vivre en sachant que votre mari ou les êtres qui vous sont chers risquent leurs vies tous les jours ?
Les militaires, les pompiers, les ambulanciers prennent des risques tous les jours. Lorsqu'un immeuble est en feu, votre instinct vous dit de sortir en courant alors que les pompiers y rentrent pour sauver des vies. Audrey a grandi dans cette mentalité, notamment à cause de son père. Personnellement, en tant que mère, je sais aujourd'hui que je pourrais faire n'importe quoi pour protéger mon fils. Avant d'avoir un enfant, j'avais entendu parler de cet instinct qui poussait les mères à se surpasser pour leur enfant, mais je n'avais pas conscience d'avoir ça en moi. Désormais, s'il y avait une voiture, un feu ou quoi que ce soit qui menaçait mon fils, je m'interposerais naturellement pour le protéger.
Il y a eu beaucoup de discussions à propos de la saison 4 de "24", qui a été assez controversée à cause de la torture, de la violence...
Attendez de voir la saison 5 (rires) !
Que pensez-vous de l'évolution de la série entre les 3 premières saisons et la 4ème ? La série a un peu changé de ton, elle est devenue plus violente, plus politique aussi...
24 repousse les limites. Ce que j'espère, en tant qu'artiste, c'est de provoquer la discussion, par exemple par rapport à la torture. Il ne s'agit pas de donner une réponse ou d'imposer une vision, mais de donner à réfléchir aux gens, que le lendemain matin ils en parlent, qu'ils se rendent compte à quel point la torture est horrible, discutable. Quelle que soit leur opinion de départ, on doit les amener à en discuter. Mettre en lumière de telles problématiques fait vivre le débat. Ce qu'il y a de pire c'est l'ignorance ou l'indifférence. Bien sûr j'ai mes opinions sur tous ces sujets, la politique, la torture, la violence... mais en tant qu'artiste, le plus important pour moi est d'amener les gens à se parler et à se questionner, parce que c'est de cette manière qu'on avance. C'est très important, en particulier vis-à-vis des plus jeunes. Je ne pense pas que la série montre la violence ou la torture sous un jour séduisant. Dans 24, il y a des conséquences émotionnelles ou physiques. Ce n'est pas comme pour James Bond qui tue des gens à tour de bras et passe à autre chose. Dans la série comme dans la vie, chaque action a une conséquence. C'est important de réaliser qu'il s'agit d'êtres humains et qu'il y a des conséquences, individuelles et générales. Je ne pense que l'on puisse faire ce que l'on veut quand on le veut et j'espère que 24 reflète cela.
Il y a aussi un glissement de point de vue par rapport à la politique dans "24". Dans les 3 premières saisons, les personnages peuvent avoir confiance dans leur administration, mais dans les saisons 4 et 5 il faut la craindre...
D'un point de vue personnel, je trouve qu'il est toujours bon de remettre en question, ce qui ne vaut pas dire s'opposer systématiquement. Dans 24, les personnages se posent des questions par rapport aux autorités. Pour vous répondre, oui, je pense qu'il y a eu un léger glissement de la série vers ce thème mais je ne peux parler des 3 premières saisons parce que je n'y figurais pas. Cette évolution est peut-être due à une situation plus globale pas seulement celle des Etats-Unis. Une série comme 24 n'a pas peur de poser des questions, de remettre des principes en question, d'aborder des thèmes parfois controversés, comme la torture ou la manière dont un pays est dirigé.
Dans "24" vous travaillez avec William Devane. Comment est-ce de travailler avec un acteur de cette dimension ?
Il est incroyable. William Devane est un véritable personnage (rires) ! Il est dans le métier depuis si longtemps. Il part dans tous les sens. Le premier jour où j'ai tourné avec lui j'avais un bandeau sur les yeux, des menottes au poignet et on nous jetait à l'arrière d'un van ! Il n'y a rien de plus plaisant que de se rendre chaque jour sur le plateau en sachant que vous allez pouvoir travailler avec des partenaires tels que William Devane et Kiefer Sutherland. Ils sont tous les deux des gros bosseurs qui rendent le travail agréable et tellement plus drôle, parfois il se passe même des choses insensées sur le plateau...
Il va y avoir un film adapté de "24". Serez-vous dans le film ?
Avec 24, on ne sait jamais ce qui va se passer ! C'est aussi pour ça que je veux jouer dans la 6ème saison parce que je souhaite que l'histoire entre Jack et Audrey continue. On ne sait pas qui apparaîtra dans le film mais ce qui est sûr c'est que Jack sera dedans (rires) ! Vous savez lorsqu'une saison de 24 commence, les scénaristes ne savent pas encore tout ce qui va se passer dans les épisode futurs... Lors du tournage de la série, il arrive que l'on apprenne que l'on joue dans une scène le matin même ! C'est aussi d'ailleurs ce qui donne ce sentiment de liberté propre à 24. Personne n'est indispensable. Votre personnage peut être présent un jour et disparaître le lendemain. Cela permet d'apprécier d'autant mieux le fait de jouer une scène. Aujourd'hui je sais que je vais jouer dans une nouvelle série (ndlr : The Nine, l'interview a été réalisée en juin 2006) et que je vais peut-être jouer dans la saison 6 de 24. Si j'apparais dans le film, ça sera tout simplement génial.
Vous avez peur qu'Audrey meurt ?
Toujours. De toute façon tout le monde un jour ou l'autre dans 24 (rires) ! C'est pour cette raison que je me dis qu'il faut apprécier l'instant présent, exactement comme dans la vie.
Votre enfant regarde "24" ?
on pas du tout, il n'a que 4 ans, mais ma belle-famille, oui, bien sûr ! Mon beau-père regardait la série avant que je joue dedans. Quand j'ai obtenu le rôle, j'étais ici en France. Je venais à peine d'arriver et ne voulais pas repartir dans la foulée, mais mon mari et mon beau-père m'ont dit que c'était une super série et m'ont poussé à y aller.
Propos recueillis par Thomas Destouches le vendredi 30 juin 2006
lors du 46ème Festival de Télévision de Monte-Carlo